Le Commentaire sur les Proverbes de Grégoire d’Elvire dans le Liber glossarum
Anne Grondeux
Université Paris Cité and Université Sorbonne Nouvelle, CNRS,
Laboratoire d’histoire des théories linguistiques, F-75013 Paris, France
Pour citer cette ressource:
Anne Grondeux. Le Commentaire sur les Proverbes de Grégoire d’Elvire dans le Liber glossarum. 2024. ⟨hal-04762465)
1. Présentation
Evêque mal connu de l’Espagne du siècle, Grégoire d’Elvire a fait l’objet de recherches par D. Wilmart (1912a, 1912b), et plus récemment par R. Guglielmetti (2016), et de J. Delmulle, qui a proposé de lui attribuer un commentaire sur le livre des Proverbes (Prou. 30, 15-20) (Delmulle 2021 ; voir Annexe 2A). Ce commentaire était conservé, sous la dénomination d’Explanatio de Salomone (CPPM I 5027), avec une attribution à Jérôme, dans les mss Paris, BnF lat. 14144 (s. ), f. 77v-79r et (partiellement) Saint-Gall, Stiftsbibliothek, 130 (s. ), p. 131-136. Selon J. Delmulle, le LG a puisé dans le traité de Grégoire d’Elvire les entrées AL111 (Allegoria), EN55 (Enigma), FI162 (Figura), MI308 (Misterium), PA361 (Parabola), PR3146 (Prouerbium), QVE179 (Quaestio), SI220 (Sillogismus), SO87 (Soloecismus, doublon erroné du précédent), TE398 (Theoria), VE385 (Versutia). Il faut toutefois ajouter les entrées AQ21 Aquila, OB422 (Obscuritas), SA392 Sanguisugia, SI225 (Sillogismus) et TE400 (Theoria).
Cependant, le tag augustinien qui accompagne très souvent les entrées correspondantes du LG fait difficulté. Il incite à privilégier, non pas la source ultime Grégoire d’Elvire, mais plutôt un dérivé pseudo-augustinien, qui ferait ici office d’intermédiaire. Un traité pseudo augustinien, intitulé Interrogacio sancti Augustini quibus modis diuina nititur scriptura (désormais Ps. Aug. interr.), a de fait été découvert aux feuillets 157v-158r du manuscrit Paris, BnF lat. 2034 (fin du s.) par Pierre Courcelle (Courcelle 1955). Une autre copie du s. découverte à la bibliothèque de Wolfenbüttel (Cod. Guelf. 99 Weiss.) a permis à Patrizia Carmassi d’en donner une édition en 2005 (Carmassi 2005, reproduite en Annexe 2B1). L’édition du même texte a été donnée par Errani-Palma en 2009 à partir du ms Cesena, Malatestiana S.XXI.5 (voir Annexe 2B2). En rapprocher le LG se heurte cependant à une difficulté majeure, car l’Interrogacio dans l’état où elle nous est parvenue ne contient pas la définition du terme Quaestio. On doit également observer qu’elle est composée de deux parties, dont seule la seconde emprunte au commentaire des Proverbes par Grégoire d’Elvire. La première partie consiste en une réflexion sur les trois composantes de la science des Écritures : l’histoire, la figure, la prophétie. Bien que l’arrière-plan augustinien en ait été souligné (Carmassi 2005, 5), le lien mérite aussi d’être établi avec Grégoire d’Elvire, qui présente la même tripartition dans ses Tractatus Origenis (tract. 5, 4) :
Quamquam dubium non sit, dilectissimi fratres, in omnibus fere libris ueteris Testamenti triplicem esse significantiam, id est prophetiae, istoriae et figurae, tamen laborandum nobis est, ut unam quamque rem in suo genere et statu disserere et adsignare possimus. Nam prophetia est in praescientia futurorum, istoria in relatione gestorum, figura in similitudinem rerum, exceptis illis, quae ad hedificationem aut consolationem aut exortationem aut ad increpationem pertinere uidentur.
Cette tripartition est en effet la source des trois entrées du LG HI243 Historia, FI155 Figura et PR2007 Prophetia
PR2007 Prophetia - Augustini : Prophetia est presciencia futurorum (= Greg. Illib. tract. 5, 9).
le De aenigmatibus Salomonis de Taion de Saragosse (qui a été rapproché de l’Explanatio) (Didone 1980, Delmulle 2021, 219 ; extraits reproduits en Annexe 2C)
un petit traité que nous baptisons, d’après son incipit, Sic enim sapientisssimus Salomon dont deux versions ont été éditées par Joel Varela Rodriguez (Varela Rodriguez 2023, 308-315) d’après les manuscrits de Paris (BnF lat. 2994A, s., f. 134r-135v ; 2D1) et de Porto (Biblioteca Pública Municipal, Sta. Cruz de Coimbra, 37, s., f. 69r-70r ; 2D2). Il est cité par Paul Alvare au siècle là encore sous le nom d’Augustin.
Le Sic enim sapientisssimus Salomon véhicule la même définition de Quaestio que le LG, et ses témoins ajoutent à la fin du texte des compléments variés (tropologia, tropi/tropus, ethimologia, analogia, metafora, ironia, glossa, solecismus). La présence de Quaestio au cœur de ces deux versions (et non à la fin), et dans le LG avec un tag Augustini montre que Quaestio a suivi le même canal de transmission, et suggère l’existence d’un recueil plus complet, porteur de la même attribution augustinienne.
Certaines versions conservent la forme du questionnement didactique, qui est impossible à reconstituer une fois qu’elle est perdue, tandis que d’autres, comme Taion, procèdent à une refonte pour l’intégrer dans une structure discursive. Les compilateurs du LG étant coutumiers des réécritures massives, aucun indice ne permet plus de savoir si les extraits ont été empruntés à l’une ou l’autre des dispositions.
Il faut encore ajouter à cet ensemble deux entrées liées à Grégoire d’Elvire : AQ21 <Aquila> et SA392 Sanguisugia (dont les parallèles sont présentés en Annexes 3 et 4). AQ21 a un tag Augustini, pour lequel deux explications peuvent être proposées : soit il s’inscrit dans la même dynamique que les entrées vues ci-dessus, soit il se justifie par le fait que le dernier élément de la combinaison emprunte, après Grégoire d’Elvire et le Physiologus, aux Enarrationes in Psalmos d’Augustin. Notons que ce passage de Grégoire d’Elvire n’est repris que dans le LG. Le tag Augustini de SE392 de l’entrée qui traite de sanguisuga ne saurait en revanche être dû ni à une combinaison, ni à un glissement de tag. On est là aussi conduit à postuler l’existence un autre recueil d’extraits, également sous patronage augustinien.
La consultation du LG fait également ressortir la paire CI287-CI288
CI287 Circumcisio - Circumcisio est cum circumducto ferro praepucii summitas amputatur (= Greg. Illib. tract. 4, 124) ; CI288 Circumcisio - Augustini: Circumcisio est in carne praepucii abscisio, quod soli Iudaei faciunt.
2. Les tags des entrées
Tag |
Nombre |
Commentaire |
(sans tag) |
1 |
|
Agustini |
3 |
|
Augustini |
8 |
|
De glosis |
5 |
glissements de tag possibles |
Esidori |
3 |
glissements de tag |
Le Liber glossarum accole à plus de la moitié de ces entrées un tag augustinien, cohérent avec l’attribution sous laquelle circulent les extraits.
3. Points particuliers
3.1. Séries et combinaisons
Deux entrées du LG inscrivent les extraits dans des combinaisons. Dans le montage qui constitue SI225, on ne saurait exclure une confusion entre syllogismus et soloecismus. La seconde entrée est davantage typique du LG, combinant l’extrait qui remonte ultimement à Grégoire d’Elvire au Physiologus et à Augustin :
Esidori = |
(cfr Ps. Aug. interr. p. 22, ex Greg. Illib. in Prou. 2, 30 ; = SO87) + (fons adhuc non repertus) + (Isid. etym. 2, 9, 2) + (= Aug. gramm. 10, 1 ?) + (Isid. etym. 2, 21, 4) |
|
Augustini = |
(= Greg. Illib. in Prou. 8, 120) + (= Physiol. B 8, 1-6) + (Aug. in psalm. 102, 9, 3–5): |
3.2. Tradition manuscrite de la source
Les doublons sont certes fréquents dans le LG, mais il est rare de repérer des doublons, voire des triplons émanant exactement de la même source. Or le LG présente deux entrées parallèles de Theoria (Theorisma, θεώρημα) et trois de Syllogismus.
Theoria
Greg. Illib. |
Ps. Aug. interr. |
TE398 |
TE400 |
theorisma / theoresma |
theoresma / theorisma |
theoria |
theoria |
diligens |
diligens |
diligens |
diligens |
uerborum |
uerborum |
--- |
uerborum |
praescriptio |
praescribtio |
praescrutatio |
praescriptio |
Les deux entrées du LG ne sont pas identiques, et leur comparaison amène quelques observations. La première concerne la forme du mot lui-même : θεώρημα est toujours rendu dans les manuscrits de Grégoire d’Elvire et de l’Interrogatio par theorisma, corrigé par certains éditeurs en theoresma, et devenu theoria dans le LG. Étant donné que theoresma n’est attesté nulle part, il serait envisageable d’éditer soit theorisma, en précisant que la forme recouvre θεώρημα, soit theorema en rejetant en variante la leçon theorisma. Si TE400 est ensuite conforme à la source ultime et à l’intermédiaire pseudo-augustinien, TE398 se singularise à la fois par la chute du mot uerborum, et par l’introduction de l’équivalent praescrutatio. Cet équivalent semble plus adapté au sens contextuel de θεώρημα que praescriptio, qui est donc à envisager comme une lectio facilior, et que le LG invite à corriger. Son tag Augustini suggère que l’Interrogatio a pu être consultée dans un état moins dégradé que celui qui nous est parvenu, en plus de l’état reflété par TE400, qui correspond littéralement à l’Interrogatio, soit le recours parallèle à une autre compilation.
Il faut d’autre part élargir le point de vue pour observer que TE398 et TE400 s’inscrivent dans une série constituée de cinq entrées (TE398-TE402). Entre les deux qui ont été étudiées ci-dessus, vient s’intercaler TE399, à laquelle nous proposons de restituer le tag De glosis apposé à TE400.
Numéro |
Tag |
Lemme |
Définition |
TE398 |
Agustini |
Theoria |
est diligens praescrutatio. |
TE399 |
<De glosis ?> |
Theoria |
mysteria diuine scripture. |
TE400 |
[De glosis] |
Theoria |
diligens uerborum praescriptio. |
TE401 |
--- |
Theoriam |
intellectum |
TE402 |
--- |
Theorias |
ad diuinitatem extendens. |
Syllogismus
Le triplon traitant de syllogismus est particulièrement intéressant, car ses trois entrées présentent le même type de variation. Les hésitations sur les termes de la définition montrent que le LG a recueilli deux dépouillements de la même source, tous deux dans un état dégradé par rapport à l’original. SO87 est notablement plus proche de Grégoire d’Elvire par ses leçons constricta et significatio, tout en portant le tag augustinien ; SI220 se rapproche lui de la version originale par la leçon conclusionis. Aucune version ne saurait découler de l’Interrogatio dans son état actuel, au vu de sa leçon cautiosa vs captiosa (ed. Carmassi, om. Errani-Palma).
Greg. Illib. |
Ps. Aug. interr. |
SI220 |
SI225 |
SO87 |
Augustini |
Esidori |
Augustini |
||
constricta |
contorta |
contorta |
--- |
constricta |
captiosa |
cautiosa |
captiosa |
captiosa |
captiosa |
conclusionis |
conclusionis |
conclusionis |
conclusaque |
conclusaque |
significatio |
significantia |
significatio |
sententia |
significatio |
3.3. Présence dans la péninsule ibérique
Les termes extraits de Grégoire d’Elvire et/ou du Pseudo Augustin (avec leurs définitions) ont connu un certain succès dans le monde des glossaires. Certains figurent en particulier dans le glossaire Abstrusa, dont disposaient le LG et Isidore de Séville :
Prouerbium |
Affat. IV 557.11 |
||
Figura |
|||
Aenigma |
Abstr. II, IV 63.23 |
Affat. IV 511.41 |
|
Parabola |
|||
Versutia |
Affat. IV 577.44 |
||
Obscuritas |
|||
Allegoria |
Affat. IV 477.1 |
||
Syllogismus |
Abba IV 287.16 |
Affat. IV 569.30 |
|
Questio |
|||
Theorisma |
Abstr. II, IV 183.19 |
||
Mysterium |
Abstr. II IV 117.10 ; 117.44 |
Affat. IV 538.12 |
Ils étaient également connus d’Isidore de Séville et de Beatus de Liebana :
Isid. etym. 1, 37, 26 : Aenigma est quaestio obscura quae difficile intellegitur, nisi aperiatur, ut est illud ‘De comedente exiuit cibus, et de forte egressa est dulcedo’, significans ex ore leonis fauum extractum.
Isid. etym. 6, 19, 42 : Graece mysterium dicitur, quod secretam et reconditam habeat dispositionem. (unde Paulus Albarus Cordubensis, epist. 10, 3, 102 ?)
Isid. etym. 10, 277 : Versutus, eo quod eius mens in quolibet actu ad quamlibet fraudem facile uertitur; unde et uersutia dicitur contorta sententia.
Beatus Liebanensis, Eterius Oxomensis, Aduersus Elipandum libri duo, 1, 81, 2297 : Obinde manducamus corpus eius et sanguinem eius bibimus, ut, sicut illud in nos inuisceratur et traicitur uisibiliter, sic nos in illo transformamur et inuisceramur, quia sacramentum est, misterium est. Quid misterium, nisi secretam et reconditam habens dispositionem ?
L’entrée SA392 Sanguisugia s’inscrit dans une série de remplois du passage original de Grégoire d’Elvire :
Greg. Illib. in Prou. 4, 51 |
Isid. etym. 12, 5, 3 |
Taio aenigm. (Varela Rodriguez 2023, 260-2) |
LG SA392 Sanguisugia [sanguisuga] |
Sanguisuga etenim uermis est aquatilis, , potantibus insidiatur cumque , faucibus adhaerescit, sanguinem exsugit, et cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat. |
Sanguisuga uermis aquatilis, . Potantibus enim insidiatur, cumque labitur faucibus uel ubi uspiam adhaerescit, sanguinem haurit ; et cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat. |
Sanguisugia uermis est aquatilis, coeno alitur, potantibus insidiatur cumque illabitur, faucibus adhaerescit, sanguinem sugit et, cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat. |
Augustini : Sanguisugia uermis est aquatilis, . Potantibus insidiatur quumque faucibus uel ubi uspiam adherescit sanguinem haurit, et cum nimio cruore maduerit euomit quod ausit, ut recenciorem denuo sugat. |
Les caractéristiques de la sangsue ici décrite (sangsue du Nil, Limnatis nilotica, cf. Delmulle 2021, 243-245) est de vivre dans l’eau (uermis est aquatilis), de se nourrir de boue (caeno alitur), de pénétrer les organismes à la faveur d’une gorgée d’eau (potantibus insidiatur), de s’accrocher à la gorge (faucibus adhaerescit), et d’y faire des dégâts de nature parasitique (sanguinem … sugat). Une fois de plus, le LG en présente une version composite. La notice retranscrite dans ses colonnes offrait encore la séquence caeno alitur, héritée de Grégoire d’Elvire, et éliminée par Isidore, mais présentait déjà la séquence uel ubi uspiam, conservée par Isidore : elle précise, assez judicieusement d’ailleurs, que la sangsue peut se fixer ailleurs que dans la gorge – on pense en particulier à l’œsophage. Nous sommes une fois de plus dans le cas où le LG exploite un dossier préparatoire d’Isidore de Séville, là où Taion se reporte directement à Grégoire d’Elvire.
Le tag augustinien montre que l’emprunt a été fait à un dossier constitué, mis sous le nom de l’évêque d’Hippone. Ces observations sont de nature à compléter la connaissance de Grégoire d’Elvire par Isidore de Séville (Martín Iglesias 2013, 268) et par les compilateurs du LG (Elfassi 2016).
Conclusion
En l’état des recherches, il apparaît qu’un recueil d’extraits de Grégoire d’Elvire a circulé sous le nom d’Augustin ; nous proposons de le nommer Excerpta ex Gregorii Illiberitani scriptis sub nomine Augustini collocata. Fondé principalement sur le commentaire au livre des Proverbes, mais aussi sur un extrait des Tractatus, il a été exploité par différents auteurs :
celui de l’Interrogatio, qui préserve le questionnement didactique et l’attribution augistienne
Isidore de Séville
le compilateur du LG
l’auteur du Sic enim sapientisssimus Salomon contenu dans Paris, BnF lat. 2994A (augmenté et passé sous forme définitionnelle) et de Porto Biblioteca Pública Municipal, Sta. Cruz de Coimbra, 37 (augmenté avec préservation de l’alternance questions / réponses)
Annexe 1 : les entrées du LG
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 8, 120) + (= Physiol. B 8, 1-6) + (Aug. in psalm. 102, 9, 3–5) |
AQ21. Aquila |
|
2 |
Esidori |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 29) |
AL111. Allegoria |
3 |
<Augustini> |
(= Greg. Illib. tract. 4, 124) |
CI287. Circumcisio |
4 |
De glosis |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 26 ; Abstr.) |
EN55. Enigma |
5 |
De glosis |
(= Greg. Illib. tract. 5, 1 ? Gloss. ?) |
FI155. Figura |
6 |
Agustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 26) |
FI162. Figura |
7 |
Esidori |
(= Greg. Illib. tract. 5, 1) |
HI243. Historia |
8 |
Agustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 33 ; = Isid. etym. 6, 19, 42) |
MI308. Misterium |
9 |
(sans tag) |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 28) |
OB422. Obscuritas |
10 |
De glosis |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 27 ; Gloss.) |
PA361. Parabola |
11 |
Augustini |
(= Greg. Illib. tract. 5, 9) |
PR2007. Prophetia |
12 |
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 25) |
PR3146. Prouerbium |
13 |
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 32) |
QVE179. Quaestio |
14 |
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 4, 51, et Isid. etym. 12, 5, 3) |
SA392. Sanguisugia |
15 |
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 30) |
SI220. Sillogismus |
16 |
Esidori |
(cfr Greg. Illib. in Prou. 2, 30 ; = SO87) + (fons adhuc non repertus) + (Isid. etym. 2, 9, 2) + (= Aug. gramm. 10, 1 ?) + (Isid. etym. 2, 21, 4) |
SI225. Sillogismus |
17 |
Augustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 30) |
SO87. Soloecismus ; |
18 |
Agustini |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 33) |
TE398. Theoria |
19 |
De glosis |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 33 ; Gloss. ?) |
TE400. Theoria |
20 |
De glosis |
(= Greg. Illib. in Prou. 2, 27 ; cfr Isid. etym. 10, 278, ut uid.) |
VE385. Versutia |
Annexe 2 : source et parallèles
A. Greg. Illib. in Prou. 30, 15-20 = Delmulle 2021, 251-252
Quae cum diceret, praestruebat animos audientium, ut non nudis uerbis crederent nec tantummodo superficiem lectionis audirent, sed medullas sermonum et obscuras ac latentes quaestiones peruestigarent. Quid est enim ʽprouerbium’, nisi uerbi figura ? Quid est figura, nisi imago ueritatis ? Quid est ʽaenigma’, nisi obscura intel-legentia ? Quid est ʽparabola’, nisi comparatiua similitudo ? Quid est ʽuersutia’, nisi contorta sententia ? Quid est ʽobscuritas’, nisi splendor latens ? Quid est allegoria, nisi inuestigandae cogitationis uis gemina, ut aliud sit in uoce, aliud in scientia ? Quid est syllogismus, nisi contorta et captiosa conclusionis significatio ? Quid est quaestio, <nisi> quae habet difficilem explicatum ? Quid est theoresma, nisi diligens uerborum praescriptio ? Quid est mysterium, nisi secretam et reconditam habens dispositionem ? Haec sunt quae inuestigare et comprehendere et planius nosse iubemur.
B. Interrogatio sancti Augustini
B1. Ed. Carmassi 2005, 21-22
Incipit interrogatio sancti Augustini quibus modis diuina nititur scriptura aut in quibus modis conprehenditur.
Respondit. Diuinarum scripturarum triplex est scientia tripertita ordine et trina narratione diuisa. Storia est, figura et prophetia. Storia est ad fidem rerum gestarum, figura ad allegoricum pertinet intellectum, ut aliud in uerbis ostendatur, aliud in rebus intellegatur. Prophetia est aut praeterita retexere aut praesentia coercere aut futura praedicare, ut Moyses in Genesi libro praeterita quae suis non erant temporibus, uel descripta uel cognita enarrauit, ut Danihel praesentia in senioribus et Susanna coercuit et futura in uisionibus reuelauit. Habet ergo storia quod legitur, figura quod intellegitur, prophetia quod aut predicatur aut dicitur aut recensitur. Storia duplex tempus est, uel praeteriti uel praesentis, dum aut gesta replicantur aut quae geruntur praesentibus paginis adcorporantur. † Figura duplici alegorizantur aenigmate quae per figura<m> dicta sunt in Veteri Testamento, accipiant ueritate<m> in Nouo†.
Quid est enim prouerbium, nisi uerbi figura ? Quid est figura nisi tecta imago ueritatis ? Quid est enim aenigma nisi obscura intellegentia ? Quid est parabola, nisi comparatiua similitudo ? Quid uersutia nisi contorta sententia ? Quid est obscuritas nisi splendor latens ? Quid allegoria nisi inuestigandae cognitionis uis gemina, ut aliud sit in uoce, aliud in scientia ? Quid syllogismum nisi contorta et cautiosa conclusionis significantia ? Quid theoresma (] theorisma W) nisi diligens uerborum prescribtio ? Quid mysterium, nisi secretam et reconditam habens expositionem ? Haec sunt quae inuestigare et plenius nosse iubemus.
B2. Ed. Errani & Palma 2009, 126
Interrogatio. Quibus modis diuiditur scriptura aut in quibus modis conprehenditur
Comme le précisent les éditeurs, « si trascrivono qui i testi che erano contenuti nella prima e nelle ultime carte dell’Isidoro Malatestiano, oggi perdute, come si presentano attualmente nell’apografo Marciano. Nella trascrizione viene adottata la punteggiatura moderna, mentre l’apparato dà conto delle condizioni materiali del testo ».
Responsio. Triplex scientia tripertito ordine trina ratio diuisa: storia, figuram et prophetiam. Storia est ad fidem rerum gestorum, figurat ad alligoricum, pertinet intellectum, ut aliud in uerbis hostenditur, aliud in rebus intellegantur. Prophetia est autem preterita reteetere (sic) aut presentia coercere aut futura presentia predicare. Sic Moyses in Genesis libro preterita que suis non erat temporibus, uel descripta uel cognita ennarrauit, ut Danihel presentia in senioribus et Susanna coercuit et futura in uisionibus reuelauit: habet ergo historiam quod dilegitur figurat. Intellegatur prophetiam quod aut predicatur aut dicitur aut recensitur. Historia duplex tempus est, preterito uel presentis, dum aut gesta replicatur aut que geruntur presentibus paginis conparantur, figura duplice alligorizatur in enigmate, quod figura dicta sunt in Vetere Testamento, accipient ueritatem in Nouum.
Quid enim prouerbium, nisi uerbum figurat et tecta immago ueritatis ? Quid est enigma, nisi obscura intellegentia ? Quid est parabola, nisi comparatiua similitudo ? Quid est uersutia, nisi contorta sententia, et quid obscuritas, nisi splendor latens ? Quid alligoria, nisi inuestigandi cognitionis, uel semina, ut aliud sit in uoce, aliud in scientia ? Quid solicismus, nisi contorta conclusionis significantia ? Quid theorisma, nisi diligens uerborum prescriptio ? Quid mysterio, nisi secreta et reconditam habens expositionem ? Haec sunt que inuestigare et nosse plenius iubemus.
C. Taio, De aenigmatibus in Salomone (Varela Rodriguez 2023, 258-272) - excerpta
1. Sunt autem in Salomonis carminibus aenigmata multa, sunt et prouerbia siue parabolae. Aenigmata sunt profundae quaestiones et intellectus obscurae, quae non simplici sed allegorico sermone proponuntur. Prouerbia sunt uerborum figurae. ut aliud sit in sermone, aliud in re : non enim in eis uerba ipsa uidentur, sed figurae uerborum ipsorum intelliguntur. Parabolae autem dicuntur comparatiuae similitudines, aliud habentes in medulla, aliud in superficie demonstrantes : non enim hoc sonant quod scriptum est, quomodo etiam in euangeliis edocemur, quod Dominus populo in parabolis et in prouerbiis sit locutus, secreto autem apostolis dissoluerit ea. Ex quo manifestum est, parabolas Salomonis non, ut simplices arbitrantur, patentia habere praecepta: sed quasi intra nucis corticem nucleus et in hirsutis castanearum operculis absconditus fructus inquiritur. ltaque in eis diuinus sensus altius perscrutatur, sicut est illud eiusdem ubi in typo dominicae incarnationis uel de sacrificio immolatae hostiae prophetauit.
D. Sic enim sapientisssimus Salomon
Citant au siècle l’incipit de ce texte, Paul Alvare le place lui aussi sous l’autorité d’Augustin (ed. Gil 2020) :
Paulus Albarus Cordubensis, epist. 3 (Iohannes Hispalensis ad Albarum Cordubensem), 5, p. 440, 128 : Sanctissimus Agustinus Ippone Regiensis episcopus, ubi de tribus sanguisugis singulariter tractauit, ita disseruit: "Scire inquid Salomon sapientiam et disciplinam et intellegere sermones prudentie hac percipere uersutias uerborum et intelligere iustitiam ueram iudicium que diligere, ut det innocentibus astutiam, puero autem iuniori sensum et cogitationem.
D1. Paris, BnF lat. 2994A, IXe s., f. 134r-135v (Varela Rodriguez 2023, 308-310)
2. *** <Figura est tecta imago> ueritatis ; enigma obscura intellegentia ; parabola conparatiba similitudo ; parabolam enim Grece dicitur adplicatio, cum aliquid alicui ad similitudinis modo adplicatur, sicut est illut scriptum : Similis est regnum celorum grano sinapis, et cetera huic similia ; uersutia contorta sententia ; obscuritas splendor latens ; allegoria inuestigande cognitionis geminata sententia, ut aliut sit in uoce, aliut in scientia, allegoria semper tres species querit, id est tribus personis, †quattuor Dei et hominis et diaboli† ; semperque Iudeis storie ueritatem est ceci<ta>tem, disciplina eius ut unde ceperit tantum sibe psalmum sibe storiam traducat, aliter sapientia non est ; silogismus id est contorta et captiosa conclusaque uerbi significatio ; ques[i]tio est que difficile, dum opponitur, explanatur ; teorisma diligentia est prescrutandi probata uel repperta uerua polita ; misteria secretam et reconditam habet dispositionem ; tropologia est : Quidam rex fecit nuptias filio suo et misit seruos suos uocare inuitatis ad nuptias ; tropi enim mores dicuntur, igitur secundum quidquid consuetudinem <h>umanam dicitur tropilogia est ; teoria dicitur Grece ‘uidet’ uel ‘inspicit’ ; quotiens aliquid uidemus et aliquid intelligimus, ad teoriam pertinet, potius <h>abens tale aliquid simile ut scriptum est : Exiet uirga de radice Iesse et flos de radice eius ascendet. Ethimologia idem intelligitur moralitas ; metafora esr quando ab aliis ad alium adsimilatur ; ex psalmo Dauid illut Scriptura continet modus : Flumina pla<u>dent manibus in idipsum, hoc est in unum uel idem ipsum ; et quid est ipsum ? Tu autem idem ipse es, et anni tui non deficient, uel sicut a Domino dictum est Moysi : Ego sum qui sum. Ironia est ficta laudatio <h>uiusmodi inter cetera similitudinem tenens, ut est illut sententie euangelice ; Amice, ad quod uenisti ?, et Tu uero homo unianimis dux meus et notus meus, qui simul mecum dulces capiebas cibos : hoc enim propter improperio dicitur.
D2. Porto (Biblioteca Pública Municipal, Sta. Cruz de Coimbra, 37, XIIe s., f. 69r-70r (Varela Rodriguez 2023, 312)
2. Quid est prouerbium nisi uerbi figura ? Quid est figura nisi tecta imago ueritatis ? Quid est enigma nisi obscura intellegentia ? Quid est parabola nisi conparatiua similitudo ? Quid est uersutia nisi contorta sententia ? Quid est obscuritas nisi splendor latens ? Quid est allegoria nisi inuestigande cognitionis bis gemina, ut aliud sit in uoce, aliud in scientia ? Quid est questio nisi quod habeat difficilem explicatum ? Quid est theorisma nisi diligens uerborum prescriptio ? Quid est misterium uel sacramentum nisi secretam et reconditam habens dispositionem ? Quid est tropus nisi translata dictio a propria significatione ad non propriam similitudinem ? Quid est analogia nisi similium conparatio siue propositio ? Quid est ethimologia nisi origo uocabulorum ? Quid est glossa nisi lingua ? Quid est soloecimus nisi plurimorum uerborum inter se inconueniens conpositio ?
Annexe 3 : Aquila
A. Greg. Illib. in Prou. 30, 15-20 = Delmulle 2021, 256
Aquila, ubicumque uiderit ex alto serpentem, magno stridore et pondere oppresso unguibus laniat et, postquam extracta de uisceribus eius uenena mortifera deterserit, adhuc sauciatum deuorat et uirus quod inerat exstinguit, igneo calore decoctum. Hoc quoque experimento aut contristatur aut gloriatur: pullos suos adhuc teneros, ut ardentis solis radios aspiciant, componit et quem uiderit lacrimantem uelut adulter<in>um reprobat et damnat. Vnam sedem et unum nidum semper habet – quod quidem clare et facile intellegi potest: una est Ecclesia, in qua thronum suum constituit ; <cui radiis> orientis solis renati sunt pulli; si infirmis oculis radiantem sacrum ignem – euangeliorum claritatem – inspicere non potuerint, erroris tenebris obcaecati, non legitimi, sed adulter<in>i iudicantur.
B. LG AQ21 <Aquila>
Augustini: De hac autem aue dicitur quod ubicumque uiderit ex alto serpentem magno stridore et pondere oppressum unguibus laniat, et postquam extracta de uisceribus mortifera deterserit, adhuc deuorat et uirus quod extinguit calore , hoc quoque experimento aut contristatur aut gloriatur pullos adhuc teneros ut solis aspiciant, et lacrimantem uelut adulterum reprobat et damnat unam et unum nidum semper habet.
Annexe 4 : Sanguisuga
A. Greg. Illib. in Prou. 30, 15-20 = Delmulle 2021, 253
Sanguisugia etenim uermis est aquatilis, , potantibus insidiatur cumque illabitur, faucibus adhaerescit, sanguinem exsugit et, cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat.
B. Isid. etym. 12, 5, 3
Sanguisuga uermis aquatilis, dicta quod sanguinem sugit. Potantibus enim insidiatur, cumque labitur faucibus adhaerescit, sanguinem haurit ; et cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat.
C. Taio, De aenigmatibus in Salomone (Varela Rodriguez 2023, 260-273, ici 260-262)
4. Sanguisugia uermis est aquatilis, , potantibus insidiatur cumque illabitur, faucibus adhaerescit, sanguinem sugit et, cum nimio cruore maduerit, euomit quod hausit, ut recentiorem denuo sugat.
D. LG SA392 Sanguisugia [sanguisuga]
Augustini : Sanguisugia uermis est aquatilis, . Potantibus insidiatur quumque inlabitur faucibus adherescit sanguinem haurit, et cum nimio cruore maduerit euomit quod ausit, ut recenciorem denuo sugat.
Références bibliographiques
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